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Enseignement explicite et systématique des connaissances et des habiletés fondamentales en lecture

L’enseignement explicite et systématique des connaissances et des habiletés fondamentales en lecture, notamment celles qui concernent l’identification de mots écrits, favorise le développement de la compréhension et de la fluidité de la lecture chez les élèves. L’enseignement systématique fait référence à l’utilisation de matériel et à des concepts qui sont enseignés selon une séquence et des pratiques d’enseignement soigneusement planifiées en utilisant des textes décodables. En utilisant une portée et une séquence appropriées, les enseignantes et enseignants s’assurent que les connaissances et les habiletés de lecture de mots sont enseignées du plus simple au plus complexe et qu’elles sont complètes. L’enseignement explicite fournit des explications claires, directes et ciblées.

Pour planifier et mettre en œuvre un enseignement explicite, systématique et différencié, les enseignantes et enseignants doivent tenir compte du fait que les élèves arrivent à l’école avec des expériences linguistiques antérieures et une exposition à la littératie très différente. La collecte de preuves d’apprentissage en temps opportun et de façon continue est cruciale pour cibler les différents besoins d’apprentissage des élèves et pour adapter l’enseignement en salle de classe, ainsi que pour soutenir le dépistage précoce des élèves qui bénéficieraient d’un soutien supplémentaire.

Les tableaux ci-dessous présentent des exemples de stratégies d’enseignement explicite et systématique des connaissances et des habiletés fondamentales en lecture, de la maternelle à la 3e année, et au-delà.

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La conscience phonologique
La conscience phonologique désigne la capacité de réfléchir à la structure sonore de la langue orale, incluant la capacité d’identifier et de produire des mots à l’oral qui partagent la même rime, d’entendre des syllabes individuelles dans un mot oral et, dans une syllabe, d’isoler la voyelle et le ou les sons qui la suivent (rime).
Exemples de stratégies d’enseignement explicite et systématique spécifiques à la langue française
L’enseignement se concentre sur la segmentation et la fusion, deux habiletés qui seront par la suite utilisées dans l’enseignement de la conscience des phonèmes. 
  • Taper dans les mains à chaque mot oral d’une phrase comportant des mots d’une syllabe, prononcée par l’enseignante, l’enseignant ou un pair.
  • Déplacer un marqueur (p. ex., un bloc de couleur) vers l’avant pour chaque mot oral dans une phrase.
  • Taper dans les mains les syllabes dans des mots oraux, en commençant par des mots composés dont chaque mot contient une seule syllabe (p. ex., « beau-père », « balle-molle »), puis passer à des mots multisyllabiques de structures variées (p. ex., « ba-teau », « ro-bot », « tra-vail », « a-na-nas »).
  • Enseigner explicitement les mots oraux qui riment et produire, à l’oral, des listes de mots qui riment (p. ex., « moi », « toi », « soi »).

 

La conscience phonémique
La conscience phonémique est une sous-composante de la conscience phonologique. Il s’agit de la capacité d’identifier et de manipuler la plus petite unité sonore dans les mots à l’oral, les phonèmes. La segmentation phonémique et la fusion phonémique sont les deux habiletés les plus importantes contribuant directement à l’apprentissage de la lecture.
Exemples de stratégies d’enseignement explicite et systématique spécifiques à la langue française

L’enseignement de ces connaissances et de ces habiletés suivent généralement cette séquence :

  • Isoler des phonèmes au début, à la fin ou au milieu d’un mot oral :
    • Quel est le premier son dans le mot oral « lac »? « l »
    • Quel est le dernier son dans le mot oral « lac »? « c »
    • Qu’est-ce que le son du milieu ou le deuxième son dans le mot oral « lac »? « a »
  • Segmenter un mot oral en phonèmes :
    • Les élèves découpent un mot oral en sons (p. ex., « bac » « b », « a », « c »).
    • Utiliser plusieurs modalités, comme le mouvement, pour enseigner aux élèves à segmenter un mot oral en phonèmes (p. ex., utiliser des mots oraux monosyllabiques de trois phonèmes; demander aux élèves de segmenter ces mots en touchant le haut de leur tête pour le premier son, leur ventre pour le deuxième son et leurs orteils pour le dernier son qu’ils entendent).
  • Fusionner des phonèmes pour former un mot oral :
    • Les élèves fusionnent des sons individuels pour former un mot oral (p. ex., « b » « e » « c » à « bec », « s » « a » « c » à « sac »).
    • Utiliser plusieurs modalités pour enseigner aux élèves à fusionner des phonèmes pour former des mots oraux (p. ex., utiliser un bloc de couleur pour représenter chaque phonème d’un mot oral monosyllabique; les élèves produisent le son correspondant lorsqu’un bloc est pointé; les blocs sont graduellement rapprochés pour faciliter la fusion des phonèmes).
  • Supprimer ou ajouter des phonèmes dans un mot oral :
    • Prononcer un mot, les élèves isolent le son au début du mot, puis suppriment ce son pour en faire un autre mot oral (p. ex., « pas » → « as », « seau » → « eau »).
    • Prononcer un mot, les élèves isolent le son à la fin du mot, puis suppriment ce son pour en faire un autre mot oral (p. ex., « sac » → « sa »; « lac » → « la »).
    • Prononcer un mot et demander aux élèves d’ajouter un son au début ou à la fin pour faire un nouveau mot oral (p. ex., « li » avec un « p » au début → « pli »).
  • Substituer des phonèmes dans un mot à l’oral :
    • Substituer ou échanger des sons dans un mot oral pour faire de nouveaux mots. Le son de la consonne initiale ou finale ou de la voyelle du milieu peut être substitué, par exemple :
      • Consonnes initiales : « bol » à « col » à « sol »;
      • Consonnes finales : « bac » à « bal » à « bar »;
      • Voyelles : « bal » à « bel » à « bol ».
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La connaissance des lettres
La connaissance des lettres fait référence à la connaissance du nom et du son des lettres de l’alphabet. Dans un système alphabétique comme le français, le principe alphabétique est l’idée que les lettres et les groupes de lettres (graphèmes) représentent les sons des mots de la langue orale (phonèmes).  
Exemples de stratégies d’enseignement explicite et systématique spécifiques à la langue française
  • Offrir des occasions de participer à des jeux structurés avec des lettres, notamment en manipulant un abécédaire tactile ou en le fabriquant :
    • former des lettres de façon multimodale;
    • apprendre quelques-unes des correspondances graphèmes-phonèmes dans des mots très familiers (p. ex., leurs noms, les mots qu’ils essaient d’écrire en utilisant une orthographe approximative);
    • enseigner l’écriture des lettres (calligraphie);
    • l’enseignement explicite des correspondances graphèmes-phonèmes.

 

La connaissance du système alphabétique
La connaissance du système alphabétique requiert un enseignement systématique et structuré des correspondances graphèmes-phonèmes et de la façon de les utiliser pour identifier des mots écrits par décodage et pour orthographier des mots écrits.

L’enseignement des correspondances graphèmes-phonèmes s’appuie sur la conscience phonémique, mais également sur la connaissance des lettres (nom et son), au fur et à mesure que les élèves apprennent la relation entre les lettres de la langue écrite et les sons individuels de la langue orale. Le fait de connaître et d’utiliser ces correspondances graphèmes-phonèmes pour identifier des mots écrits (décodage) de façon régulière fait en sorte que ces mots sont susceptibles d’être éventuellement reconnus de façon instantanée (c.-à-d. qu’ils sont reconnus rapidement sans qu’une stratégie de décodage systématique soit appliquée).

Exemples de stratégies d’enseignement explicite et systématique spécifiques à la langue française
Lorsque les élèves maîtrisent les correspondances graphème-phonème de plusieurs consonnes et voyelles et les utilisent pour identifier les mots écrits ou pour produire des mots écrits, la fusion et la segmentation phonémique n’ont plus besoin d’être mises en pratique isolément. En effet, ces habiletés phonémiques peuvent être couramment pratiquées dans le contexte de la lecture et de l‘écriture des mots écrits. Apprenez aux élèves à fusionner les sons des lettres lorsqu’ils identifient des mots écrits simples et à segmenter les mots en sons lorsqu’ils orthographient les mots écrits.

L’enseignement des correspondances graphèmes-phonèmes suit généralement cette progression :

  • Correspondances graphèmes-phonèmes simples 
    • commencer par les voyelles (p. ex., a, e, i, o, u, y) et les consonnes qui s’allongent (p. ex., f, j, l, m, n, r, s, v, z)
    • présenter graduellement les consonnes qui ne s’allongent pas (p. ex., b, c, g, p, t)
  • Correspondances graphèmes-phonèmes complexes (digraphes, trigraphes)
    • commencer par les voyelles représentées par un digraphe (p. ex., ai, on, eu, etc.) et les consonnes qui s’allongent (p. ex., ch, ph)
    • présenter graduellement les consonnes qui ne s’allongent pas (p. ex., gn, qu)
    • présenter les trigraphes (p. ex., ain)
  • Correspondances graphèmes-phonèmes qui impliquent une des 3 semi-consonnes du français (p. ex., oi, ille, ail, ouille, ui)
  • La lettre « e » en position finale peut être présentée aux élèves comme étant une lettre muette qui sert souvent à faire chanter la consonne qui précède (p. ex., banane)

Au fur et à mesure que les correspondances graphèmes-phonèmes sont apprises, amener les élèves à utiliser celles-ci pour identifier par décodage (c.-à-d. oraliser) des mots écrits isolés.

La progression devrait prendre en considération les éléments suivants.

Identifier (oraliser) des mots écrits monosyllabiques avec des structures simples :

  • consonnes-voyelles (p. ex., bu, ma, ni, ra(t));
  • consonnes-voyelles-consonnes (p. ex., cap, sec, sac, fil);
  • consonnes-consonnes-voyelles (p. ex., tri, cru, gro(s), prê(t), pli,).

Identifier (oraliser) des mots écrits monosyllabiques ou bisyllabiques qui incluent :

  • des digraphes de voyelles (p. ex., bijou, auto, radis, balai);
  • des digraphes de consonnes (p. ex. nich(e), chic, mâché, gagner);
  • une des 3 semi-consonnes (p. ex., fill(e), bataill(e), fouill(e), éveil, fuit(e), tuil(e), voir, étoil(e), etc.);
  • le « e » muet en finale (p. ex., boul(e), min(e), bell(e), patat(e));
  • une syllabe commune dans des mots multisyllabiques (p. ex., rideau, garderi(e), rivière, marinade).

Lorsque la stratégie de décodage primaire échoue, l’enseignante ou l’enseignant peut inviter l’élève à :

  • décomposer le mot écrit en syllabes ou en parties plus petites (graphèmes);
  • produire le son ou les sons correspondants;
  • fusionner ces sons pour oraliser le mot.

D’autres stratégies de dépannage peuvent également être utilisées si celles-ci ont été enseignées :

  • identifier un autre mot ou une partie d’un mot connu dans le mot à lire;
  • identifier des préfixes ou des suffixes et les combiner avec le reste du mot à lire.

Donner aux élèves la possibilité de mettre en pratique les correspondances graphèmes-phonèmes pour décoder (oraliser) des mots écrits de façon isolée ou dans une variété de textes.

 

L’analyse de mots écrits
Les habiletés d’analyse de mots écrits s’appuient sur la conscience phonémique et sur les habiletés de correspondances graphèmes-phonèmes. L’analyse de mots écrits rend explicites les structures ou les régularités orthographiques les plus fréquentes des mots écrits. L’enseignement de l’analyse de mots écrits se concentre sur les similitudes entre les mots écrits pour en dégager certaines structures ou certaines régularités orthographiques les plus fréquentes. Les élèves apprennent les différentes structures ou régularités orthographiques les plus fréquentes des mots en français au-delà des correspondances graphèmes-phonèmes qui ont été enseignées par le décodage. L’analyse de mots écrits intègre également la connaissance de la structure des morphèmes des mots (préfixes, suffixes, mot de base).  
Exemples de stratégies d’enseignement explicites et systématiques spécifiques à la langue française

L’enseignement porte sur des structures et des régularités orthographiques de même que sur la structure des morphèmes des mots écrits. Il peut s’agir de nouvelles structures ou de structures nécessitant un renforcement pour la lecture et l’orthographe des élèves.

Structures orthographiques fréquentes

Certaines structures sont plus fréquentes dans les mots écrits. Ces structures peuvent être des syllabes (p. ex., mer est à la fois un mot, mais est aussi une syllabe dans les mots amer et merci) ou des unités plus petites que la syllabe comme la combinaison de 2 consonnes.

La combinaison de 2 consonnes au début ou à la fin d’une syllabe est fréquente en français. Les structures les plus fréquentes impliquent la combinaison consonne + r (p. ex., bras, crapaud, crème, frite, grand, prix, trou, abri) et la combinaison consonne + l (p. ex., bleu, blague, tableau, claire, flute, glouton, planche, établir). 

L’enseignante ou l’enseignant pourra :

  • constituer une liste de mots écrits qui contiennent une combinaison de consonnes choisies;
  • observer et discuter de cette similitude orthographique entre les mots;
  • faire lire oralement les mots qui contiennent cette combinaison de consonnes.

Régularités orthographiques contextuelles fréquentes

Certaines correspondances entre les graphèmes et les phonèmes varient en fonction du contexte orthographique, c’est-à-dire en fonction des lettres qui précèdent ou qui suivent une correspondance donnée.

Les régularités orthographiques contextuelles les plus fréquentes en français sont les suivantes :

  • c suivi du i ou du e (c doux; p. ex., cigale, céleri, cidre, épicerie, glacier);
  • g suivi du i ou du e (g doux; p. ex., magie, genou, géant, ménager);
  • s situé entre 2 lettres voyelles (p. ex., cousin, bison, misère, poison);
  • e suivi d’une consonne dans la même syllabe (p. ex., mer, perdu, elle, appel, terre);
  • o suivi d’une consonne dans la même syllabe (p. ex., bol, sortir, parole, école, ordinateur);
  • eu suivi d’une consonne dans la même syllabe (p. ex., peur, menteur, beurre, seul);
  • t suivi du i + autre voyelle (p. ex., patio, récréation, patience);
  • constituer une liste de mots qui contiennent une régularité orthographique contextuelle;
  • observer et discuter de la régularité orthographique;
  • trouver d’autres mots qui contiennent cette régularité orthographique. Comparer avec des mots où cette régularité ne s’applique pas (p. ex., g qui n’est pas suivi de « e » et de « i » et ne se prononce pas comme un g doux, se prononce comme un g dur);
  • faire lire oralement des mots qui contiennent cette régularité orthographique contextuelle.

Préfixes ou suffixes fréquents

Les mots multisyllabiques sont souvent constitués d’un préfixe ou d’un suffixe. Le préfixe se place devant le mot de base (p. ex., re_ : refaire, recommencer). Le suffixe se place à la fin du mot de base (p. ex., age : cirage, bricolage). La présence d’un préfixe ou d’un suffixe a un impact sur le sens du mot.

La structure orthographique des préfixes et des suffixes peut être relativement simple (p. ex., re, dé, an, é, al, oir, té) ou plus complexe (p. ex., macro, anti, pathe, crate). De plus, le sens auquel ces préfixes et suffixes réfèrent peut être connu (re = à nouveau) ou relativement inconnu des élèves (p. ex., tri = trois). Les préfixes et les suffixes les plus fréquents, dont la structure orthographique est la plus simple et dont le sens est connu des élèves doivent être priorisés.

  • constituer une liste de mots qui contiennent un préfixe ou un suffixe;
  • montrer comment le fait d’ajouter ce préfixe ou ce suffixe modifie le sens du mot avec des exemples;
  • faire lire oralement des mots qui contiennent ce préfixe ou ce suffixe;
  • fournir aux élèves un ensemble de lettres et leur demander de faire le plus de mots possible avec ce préfixe ou ce suffixe. Discuter du sens de ces mots;
  • donner aux élèves l’occasion de s’exercer avec les préfixes, les suffixes sur des mots isolés, en lecture de texte et en orthographe. Bon nombre de morphèmes peuvent être particulièrement utiles pour l’apprentissage du vocabulaire dans des domaines précis comme les sciences, les études sociales ainsi que dans les documents de lecture pertinents sur le plan culturel. Par conséquent, ils peuvent être renforcés en lecture et en écriture dans tous les programmes d’études.

Lorsque la stratégie d’analyse de mots écrits échoue, soutenir l’élève dans l’utilisation de cette stratégie. Par exemple, l’enseignante ou l’enseignant peut inviter l’élève à :

  • repérer un mot ou une partie de mot (structure ou régularité orthographique contextuelle, préfixe, suffixe, mot de base) connu à l’intérieur du mot écrit;
  • s’il y a lieu, décomposer le mot écrit en parties plus petites (p. ex., graphèmes)
  • prononcer chaque partie et les fusionner.

D’autres stratégies de dépannage, comme la stratégie de décodage primaire (correspondances graphèmes-phonèmes), peuvent également être utilisées.